Greenway a republié ceci
Depuis 1992, j’ai commencé à pratiquer l’Analyse du Cycle de Vie (ACV). Au fil des années, je suis arrivé à une conclusion simple mais dérangeante à chaque fois que je discute avec des experts en ACV : « L’ACV est une approche multicritère… mais dominée par un flux unique. » Curieusement, les bases de données ACV ont réussi malgré des décennies de travaux, de thèses et d’expertises à masquer cette évidence. Peu de chercheurs ou praticiens osent le soulîgner directement par conséquent cette réalité reste rarement discutée dans la littérature. sans doute par habitude ou par confiance excessive aux Bases de données ACV. En effet, lorsque j’ai commencé à analyser en détail les résultats des ACV, j’ai rapidement constaté que la majorité des impacts environnementaux sont fortement corrélés à la consommation énergétique notamment fossile. La plupart des études ACV que j’ai connues et qui reposent exclusivement sur les bases de données ACV n’ont pas contredit ce constat. Pourtant cette dépendance quasi totale à l’énergie et plus précisément au combustible fossile reste largement ignorée dans l’interprétation des résultats. Parmi les impacts environnementaux évalués, les émissions de gaz à effet de serre, notamment le CO2 reposent sur des données généralement fiables fondées sur des facteurs d’émission bien établis qui sont proches des référentiels du GIEC. En revanche les autres impacts liés aux autres flux (SOx, NOx, particules, métaux lourds…) sont marqués par une forte incertitude. Ces impacts reposent sur des estimations moyennes ou des mesures ponctuelles mais rarement contextualisées et souvent éloignées spatialement de l’utilisateur final de la donnée finale p(extraction, raffinage, transport) ce qui en réduit la pertinence pour les décisions locales ou sectorielles. Si l’ACV est théoriquement multicritère, elle repose quasiment entièrement sur un flux unique qui est le combustible fossile avec un seul indicateur réellement robuste : le carbone. D’où ces questions fondamentales : - Faut-il continuer à présenter l’ACV comme une approche exhaustive ou admettre qu’en pratique elle masque une forte dépendance au carbone et à l’énergie ? - Peut-on justifier des choix stratégiques sur la base d’impacts incertains qui sont difficilement traçables et localisables ? À l’heure où nous devons accélérer les décisions climatiques, il est peut être temps de recentrer l’analyse sur les données fiables et opérationnelles et de repenser notre usage de l’ACV. Le problème n’est pas l’ACV en soi mais il réside dans la manière dont ses données sont perçues et utilisées. Débat ouvert …