La canicule de trop
Homo festivus a eu trop chaud cet été.
Depuis l’importante découverte ethnologique faite en 1998 par Philippe Muray, nous savons qu’Homo festivus (l’Homme festif) règne en maître sur notre chère planète : « Dans le monde hyperfestif, la fête n’est plus en opposition, ou en contradiction, avec la vie quotidienne : elle devient le quotidien même, tout le quotidien et rien que le quotidien. » (Janvier 1998 – « Après l’histoire » – Les Belles Lettres).
Et d’ajouter : « Elle ne peut plus être distinguée, et tout le travail des vivants […] consiste à entretenir indéfiniment une illusion de distinction ».
La fête permanente en quelque sorte, individuellement ou à grande échelle, dans sa vie privée ou publique, chez soi ou sur sa trottinette électrique, en famille ou sur les réseaux sociaux, au travail comme en vacances …
Donc, Homo festivus a eu trop chaud cet été
Et son moral est dans les chaussettes : Plus de 40° dans certaines régions françaises pendant plusieurs jours, du jamais vu parait-il : « Juillet 2019 est le mois le plus chaud jamais mesuré dans le monde, selon le programme européen Copernicus » (France TV Info, 5 août 2019).
D’autant que les indicateurs vont largement au-delà des plus folles attentes en matière d’indignation. Les prévisions alarmistes succèdent aux prévisions alarmistes : de 1,5 à 5 °c d’augmentation de la température moyenne terrestre, de 1 à 20 m d’élévation du niveau des mers, sécheresses et inondations cataclysmiques, incendies gigantesques …
On peut s’étonner de l’imprécision des pronostics mais, dans tous les cas, le tableau est sombre, faute d’être frais.
Indigné !
Comment, se dit Homo festivus, mes magnifiques plages seraient submergées, mes belles montagnes n’auraient plus de neige, mes pelouses ne seraient plus que des champs de cailloux, mes forêts réduites à des troncs calcinés, mes jardins familiaux stériles et mes façades végétales desséchées ?
Quoi de plus normal, me direz-vous, qu’un grand amoureux de la nature se hérisse à l’idée de la voir disparaitre ? Disons plutôt qu’il redoute la disparition de ses terrains de jeux favoris. Car il sait bien se scandaliser lorsque la nature le perturbe, comme pour ces cigales qu’un maire du Gard a été sommé récemment de faire taire, sans succès pour l’instant, ou pour le coq Maurice qui ne doit qu’à la justice de pouvoir continuer à saluer le lever de soleil au-dessus de son Ile d’Oléron natale.
Alors, finie la fête ?
Rassurons-nous, il n’en est rien. Car, comme l’écrivait Philippe Muray en 1998, « pour comprendre quelque chose à l’époque qui commence, il est indispensable de faire le pari que la métamorphose a déjà eu lieu ».
Homo festivus organise donc des manifestations « pour le climat », dans la plus pure tradition hyperfestive, au même titre que la gay pride, ou la love parade. Personne, y compris dans ces manifestations, ne soutiendrait que cela permettrait en quoi que ce soit de modifier la direction vers laquelle on nous dit que nous allons. Mais là n’est bien sûr pas l'important.
Un comportement très alerte
Il s’amuse à se faire peur en multipliant sur les réseaux sociaux des ‘alertes’ toutes plus ébouriffantes les unes que les autres : « Notre subsistance nous forcera à biner nos champs » (le triomphe des écolos, incidemment), « Nous sommes dans la phase Titanic » (Croisière de luxe, toujours le côté festif), « La Terre aura fait le tri pour son équilibre » (l’humanité est de trop sur cette planète), etc. etc.
La science-fiction règne en maître.
Créateur de modes
Il imagine des modes de vie ‘alternatif’, où il brûle apparemment ce qu’il adorait hier, activité d’autant plus festive que cela lui permet de se faire (bien) voir sur les réseaux sociaux.
Finis par exemple les trajets en voiture, place au train pour aller loin et aux ‘nouvelles mobilités’ en ville, à la plus grande joie des jeunes citadins et citadines intramuros. Terminés les voyages en avion, le nec plus ultra étant de pouvoir disposer d'un yacht à voile pour traverser les mers.
Et, que n’y avons-nous pensé plus tôt, finie l’école, point d’orgue de l’hyperfestif, où des adultes accepteraient que leurs enfants cessent de travailler et d’apprendre, ce qui est pertinent d’une certaine manière car il n’est pas besoin de formation particulière pour faire la fête.
Expert en bienveillance
Comme il se doit de la part de ce « trublion normalisé », ainsi que le qualifie Philippe Muray, Homo festivus invente d’autres modèles économiques, jetant aux orties celui qui, pourtant, lui permet de vivre dans l’hyperfestif : Les entreprises n’ont donc plus vocation à créer de la richesse mais à cocooner leurs salariés.
C’est l’ère de la « bienveillance au travail », de la « responsabilité sociale de l’entreprise », bref l’ère de l’entreprise maternelle (le paternalisme n’est plus à la mode), pour éviter à chacun et chacune toute obligation de nature professionnelle qui pourrait faire obstacle à son ‘épanouissement individuel’.
Le plus étonnant étant que ces revendications se font au nom de la performance, qui en serait améliorée, mais qui pourtant est le cadet des soucis d’Homo festivus …
La Terre reconnaitra les siens
Pour mieux atteindre la communion spirituelle Homo festivus se crée de nouvelles religions, au risque d’ailleurs de développer une entreprise de moralisation et de puritanisme située à l’opposé de son discours rebelle libertaire.
Religions où l’animisme le dispute au culte de Gaïa afin qu’il soit clair que l’intention est bien ici de faire table rase du passé, passé dont en fait Homo festivus feint d’ignorer à peu près tout (la fin de l’Histoire, n’est-ce pas ?).
Religions dont les rites et les prêtres sont célébrés sur les réseaux sociaux et les médias, et qui ont même réussi à se trouver une jeune prophétesse, austère et autiste.
Pas tous coupables
Mais Homo festivus est aussi très en colère, comme l’enfant qu’il est et qui découvrirait que son jouet va lui être confisqué. Il cherche donc des boucs émissaires : Les générations précédentes, évidemment, mais aussi les riches, les occidentaux, les pays développés, … Il ne lui viendrait pas à l’idée que personne ne se lève le matin en se disant : « Bon, de combien de degrés vais-je pouvoir élever la température aujourd’hui ? ».
Tout cela à cause d’une canicule …
Winter is coming
Mais les saisons se succèdent et les températures vont baisser. Et bientôt le plaisir pour l'instant renouvelé de voir la neige sur nos merveilleux paysages de montagne, dont Homo festivus va peut-être oublier pendant un temps qu’ils sont censés disparaitre.
La pression baissera-t-elle aussi ? Rien n’est moins sûr … Le réchauffement climatique a ceci de pratique qu’il est la cause de tous les maux : S’il fait trop chaud, évidemment, mais aussi s’il fait trop froid (les arguments ne manquent pas : disparition du Gulf Stream, descente des icebergs plus au sud, …).
D’une manière générale on peut parier que dès qu’un indicateur s’écartera un peu trop de la moyenne la tentation sera forte d’y voir la main du réchauffement climatique, comme par exemple l’immigration : « Le changement climatique a un impact sur les pays d'Afrique et ça pousse à la migration des femmes et des hommes », nous explique David Cormand, secrétaire national d’EELV. Les migrations ne seront donc plus ‘économiques’ mais ‘climatiques’, ce qui bien entendu sert de justificatif pour demander l’ouverture inconditionnelle de nos frontières.
Et le réchauffement climatique dans tout cela ?
C’est paradoxalement un peu le grand absent car, à force de le servir à toutes les sauces, on en oublie l’essentiel : Ce qu’il faudrait mettre en œuvre pour en amortir les conséquences et construire l’avenir pour nos descendants.
L’émission de gaz à effet de serre a en effet peu de chance de diminuer. Nos efforts en Europe pour la ralentir, notamment, seront immédiatement annihilés par la croissance des émissions issues de pays en développement rapide comme la Chine et l’Inde. De plus les choix énergétiques faits par un pays comme l’Allemagne, au détriment du nucléaire et au profit de sources non stables comme l’éolien, l’obligent à faire appel à des centrales thermiques émettrices de CO2 quand la météo fait des siennes.
Les gesticulations d’Home festivus seraient donc contre-productives ?
La canicule de trop, assurément !
Mosaïste :habillage de sculpture in mixed media. Enseignante
5 ansBienvenue! Bon zoom sur cette superficialité de ces masses gagnées par ces soi-disant bonnes causes agitées tel un pompon pour aborder le fond et souligner la complexité de ce changement vital de trajectoire pour les générations futures
eXpert & Partner in Operational Excellence
5 ansTroll & Co ... merci 😅
Global Key Account Manager at TotalEnergies
5 ansNotre monde est tellement pas climatocool, faut le jeter ! J'en commande tout de suite un plus green sur Amazon et ensuite je vais teufer.