Le commerce 3.0 (repris par FrenchWeb)

Le commerce 3.0 (repris par FrenchWeb)


Parce que les modes de consommation et les marchés évoluent, quels sont les fondements d’un business model durable ?

Sur fond d’avènement d’une société en rapide mutation, notre époque est marquée par la convergence de quatre ruptures majeures : 

- une rupture économique : de la possession à l’usage. De part une facilité d’accès à l’information, nous basculons d’une logique de production et distribution de masse à une logique de la solution, de l'usage et de la pertinence pour l’individu.  Autrement dit, une économie de l'immatériel dont le fonctionnement est à l'opposé de celui de l'économie matérielle.

- une rupture écologique : de l’insouciance à la prise de conscience de notre dépendance à la Terre et ses écosystèmes harmonieux.

- une rupture sociologique : la quête de sens et de partage, le désir d’autonomie voire de liberté jusqu’à remettre en cause les autorités sous toutes leurs formes.

- une rupture technologique qui entraine une rupture méthodologique : le numérique et les nouvelles formes de communication et de diffusion de l'information ont fait éclater les unités de temps, de territoire et de fonction.  Cette situation nous conduit à cesser de penser en binaire du fait des liens permanents et fluctuants d'une pensée complexe. 

Face à ces mutations, la plupart des organisations cherchent à s’adapter. Tenir les fondamentaux métiers et viser l’excellence opérationnelle est indispensable mais pas suffisant. Les entreprises qui gagnent sont celles qui cultivent une VISION et des VALEURS clairement exprimées et entretenues, le socle d’une reconnaissance à part entière, indispensable pour fidéliser les clients et engager les collaborateurs.

Pour définir ces valeurs et entretenir la vision, je partage ici ce que je considère être les 5 grands fondements pour construire ou reconstruire un business model pérenne : 


1.   S’assurer que son offre réponde toujours à un besoin, qu’elle apporte une solution... ET cultiver sa différence dans le traitement. 

En deux mots, POUR QUOI ?   Cette question peut paraitre simpliste, il est pourtant essentiel de la rappeler régulièrement. Le monde change, la concurrence se transforme, les envies des clients évoluent... 

Ainsi, les réponses permettent de réaffirmer le cœur de la promesse de votre organisation et renvoie à des questions subsidiaires : la conception et la fabrication sont-elles toujours à l’avant-garde des savoirs faire ? Quelle place prend l’innovation ? La formation des équipes concernées est-elle pertinente ?  Que disent vos meilleurs clients sur ce point ?

En lien, une autre question prépondérante doit aussi être traitée régulièrement en se mettant à la place du client :  Pourquoi consommer votre offre plutôt qu’une autre? La quasi-totalité des marchés sont concurrencés, voire saturés. La notion de différenciation est primordiale. C’est le « supplément d’âme » qui fera la différence. Nous parlons là d’émotion, voire d’affectif entre la marque et ses clients.  Quel est votre parti pris ? Quel « lifestyle » votre marque va-t-elle revendiquer ? Concrètement, au-delà du produit (la première promesse qui doit être tenue), c’est l’expérience unique pour chaque client qui permettra de fidéliser.  Comment aligner les organisations pour entretenir cette RELATION PERSONNALISEE (recommandations d’offres produits et services via les algorithmes, CRM personnalisée, livraison sur mesure, attentions particulières...) ? 

Aussi, la clé du succès durable passera par la cohérence des expressions que le client rencontrera dans tous ses points de contacts avec l’entreprise ou la Marque : relations physiques, vocales et digitales.

Outils, moyens : perception clients de la valeur de marque (format NPS), veilles marché, tables rondes clients, politique de formation métiers, plateforme de Marque avec ces dérivés telles que les plateformes relationnelle, numérique, programme CRM, livraison du dernier kilomètre, ...etc


2.   Donner du sens à son activité et assurer sa Responsabilité Économique, Sociale, Sociétale et/ou Environnementale (RESSE) et cultiver la transparence.

Le business durable sera « responsable » !  Au-delà de la loi PACTE qui s’annonce en France, les consommateurs sanctionneront les modèles économiques qui ne cultivent pas leur Responsabilité Sociale, Sociétale et/ou Environnementale. L’enjeu pour l’entreprise est d’être reconnue comme un acteur(pas uniquement un financeur, #fondation) du développement durable en apportant des solutions à ses clientspour que la consommation de ses produits/services fasse progresser nos Sociétés.

Aussi, orienter sa stratégie vers une économie durable est une opportunité formidable pour mobiliser les équipeset améliorer son image employeur.

Œuvrer pour un développement durable dans le cas d’une transformation de modèle, c’est avant tout tenir sa rentabilité (R. Économique), sous peine de ne pas avoir les moyens d’engager les autres responsabilités Sociales, Sociétales et/ou Environnementales. Cette évidence est trop souvent mal communiquée auprès des équipes et des clients... Jouer la TRANSPARENCE sur ces sujets est primordial pour mobiliser les collaborateurs et s’attaquer collectivement à la RSSE avec cette « contrainte » : comment travailler autrement pour servir nos clients, contribuer à améliorer la Société avec un minimum d’impact sur la Nature et tenir la rentabilité de l’entreprise ? Pour ce faire, les actionnaires devront souvent décider d’un niveau de rentabilité dégradé pour les périodes de transformation. Le pari se situera alors davantage sur le moyen-long terme avec une meilleure fidélisation et des prises de parts de marché. Il s’agit d’être croyant...

A l’instar des « transformations digitales », les départements RSSE et leurs missions transversales ont fleuri ces dix dernières années, avec comme ambition de réfléchir à des actions pour la transition énergétique, pour l’épanouissement des salariés...  Cette organisation place la RSSE sur un champ d’action à part, elle ne peut être qu’un pansement sur la stratégie de l’entreprise et apporte des actions souvent trop superficielles.  

Plus engageant et plus efficace, ces responsabilités doivent intégrer tous les métiers avec les changements de méthodes, de process et d’évaluations que cela sous-entend. Il s’agira d’éviter les ruptures radicales, trop risquées pour l’entreprise, et préférer manager des ruptures incrémentales (cf. Point 3 sur l’amélioration continue)

Toujours sur l’aspect managérial, la RSSE doit clairement influencer le SENS que vise l’entreprise et se traduire concrètement dans les VALEURS et la VISION. Ces étendards revendiqués, sources d’innovations, de créations de valeurs et de performances économiques, assureront une meilleure implication des collaborateurs et des clients. 

Fort des premières avancées, il faut largement communiquer avec fierté les actions engagées en s’appuyant sur des preuves concrètes de réalisation : la traçabilité est fondamentale dans ce domaine (#greenwashing, #socialwashing). Au-delà du bénéfice commercial évident que cette communication « sincère » apportera, cela développera la fierté d’appartenance de tous les collaborateurs... (fierté d’appartenance = performance).


Outils, moyens :  ateliers collaboratifs pour transformer les métiers, orienter la politique de formations, viser les partenariats responsables avec les acteurs en amont, transformer les tableaux de bord de lecture de l’activité. 

Conviction personnelle concernant l’écologie : pour les métiers de la production, privilégier l’économie circulaire qui vise à limiter l’utilisation des ressources naturelles par le recyclage des produits finis et usagers. Cette logique "embarque" aussi les consommateurs qui peuvent devenir acteurs en rapportant leurs produits.


3.   Cultiver l’amélioration continue, entretenir l’innovation et la créativité.

Héraclite disait déjà : « Rien n’est permanent sauf le changement … ».  Pourtant le changement dérange, la plupart d’entre nous bougeons quand on n’a plus le choix, et parfois trop tardivement. 

Il appartient donc à l’entreprise de cultiver cet état d’esprit que prône l’amélioration continue (du japonais « Kaizen » : changement meilleur). Plus qu’une technique ou un style de management, on parle d’un mode de pensée qui prône une évolution progressive qui s’opère jour après jour. Ainsi, à l’inverse de l’innovation de rupture qui se base sur l’investissement, le Kaizen se base sur la remise en cause permanente de tous les métiers pour mieux répondre aux ambitions de l’entreprise. Cela sous-entend de cultiver la transparence des enjeux, des objectifs, des réalisations, ...

Changer quand tout va bien... L’amélioration continue part du principe que, notamment dans un marché très concurrentiel, le fait de stagner est néfaste pour l’entreprise. Même si son fonctionnement est impeccable et que les chiffres sont à la mesure des attentes, une société statique ne peut pas être au niveau. Même si le changement fait souvent « peur » ou peut être mal appréhendé, il est paradoxalement nécessaire pour apporter une constance à l’entreprise. Cette amélioration ne demande ni investissement ni gros moyens particuliers, mais juste la participation active de tous les acteurs de l’entreprise. Les changements sont « petits », mais s’opèrent au niveau de chacun, avec les moyens disponibles.

L’application de l’amélioration continue se divise en 4 phases pour former un cycle permanent : Planifier, Réaliser, Vérifier, Améliorer.  Ce schéma doit s’appliquer à travers trois types d’actions récurrentes dans une entreprise : l’action curative, qui intervient juste après un dysfonctionnement ; l’action corrective, qui agit de manière différée sur les causes du problème afin qu’il ne se reproduise plus ; et l’action préventive, qui se met en place sur les causes probables d’un dysfonctionnement éventuel. Évidemment, les actes « préventifs » doivent petit à petit supplanter les actions curatives.


Outils, moyens : veilles marché sur les évolutions, écouter les clients, service R&D, ritualiser des réunions pour améliorer les process métier : méthode « design-thinking », entretenir la culture du « test&learn » de « l’A/B testing », faire l’éloge des échecs...


4.   Animer tous les métiers au service de la satisfaction des clients jusqu’à faire collaborer les utilisateurs.

Être « customer centric » ! Peut-être un bon motif pour casser les silos... Beaucoup de sociétés se bornent aux métiers qui ont un contact direct avec la clientèle : ventes, marketing, web, SAV. Il faut aller plus loin et « embarquer » aussi les métiers « back office » tels que la production, la logistique, l’informatique...jusqu’à la finance. Se faisant, c’est tous les collaborateurs qui sont sensibilisés à la finalité de la chaine de valeurs que chacun compose avec une seule obsession : SATISFAIRE LE CLIENT FINAL. 

Concrètement cela sous-entend d’avoir et d’animer les résultats (récents et récurrents) de satisfaction des clients à l’ensemble des collaborateurs. Encore plus poussé, certaines entreprises instaurent des rituels de « journées terrain » à tous les collaborateurs avec l’objectif d’échanger directement avec les clients (magasins, service client, forums, ...). Ces journées sont ensuite débriefées et doivent amener à des propositions d’améliorations.

Au-delà des évaluations nécessaires, les entreprises « centrée client » organisent la collecte d’un maximum de données produites par leurs clients (data) : les récences, fréquences et montants d’achats, les avis produits, les abandons de paniers sur le web, les associations d’achats, les avis sur les réseaux sociaux, sur les forums, les enquêtes de satisfaction...  Certaines entreprises vont jusqu’à solliciter le client pour tester ou encore co-construire leurs offres en les invitant à participer activement à des réunions au sein de l’entreprise.  

« Le client devient un collaborateur à part entière... » 

On ne parle pas ici de n’importe quel client. Issu du principe de Pareto des 20/80, l’entreprise gagnera davantage à combler grandement peu de consommateurs plutôt que satisfaire moyennement un grand nombre.

Troisième dimension pour cultiver son « esprit commerçant » : la communication. L’entreprise a intérêt à animer les communautés d’usagerssur les réseaux sociaux et les forums (la publicité institutionnelle perd de sa pertinence en termes de ROI) et devenir ainsi « influenceur » sur des sujets « lifestyle » qui servent son image de marque.  


Outils, moyens :  synthèse des retours clients sur l’offre, le service, la communication (Net Promoteur Score, client mystère, évaluations produits, retours SAV, tables rondes...), communication récurrente sur la satisfaction des clients, réunions de travail avec des clients usagers, ...


5.    Libérer les énergies des équipes, cultiver un management collaboratif et entretenir l’intelligence collective 

Le monde est complexe, il se transforme et accélère. Il serait présomptueux de penser qu’un comité exécutif ou autre comité de direction réunissant seulement quelques personnes puissent intégrer l’ensemble des évolutions des modes de consommations et des composantes métiers pour y répondre.

En lien avec la « philosophie » du Kaizen (point 3 « L’amélioration continue »), les entreprises ont intérêt à cultiver le principe de subsidiarité d’une part et la liberté d’expression et de réalisationd’autre part.

Je développe les composantes nécessaires pour un management qui vise à libérer les collaborateurs dans l’article Le Dirigeant 3.0 :  Porter une vision clairement partagée Responsabiliser et développer l’autonomie de chaque collaborateur Réduire les contrôles qui ne servent pas l’autonomie Écouter les équipes Cultiver le plaisir, l’accessibilité et le partage Se déconnecter et préférer la relation.


Outils, moyens : disponibles dans l’article Le Dirigeant 3.0


Agnes Vernier

CMO - IKOMOBI - Agence digitale #digital4good

6 ans

Tout à fait en phase !

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