Quand procrastiner devient efficace

Quand procrastiner devient efficace

Le 25 mars est la journée mondiale de la procrastination. Longtemps associée à l'inefficacité et perçue comme l'ennemi de la productivité, cette attitude est aujourd'hui reconsidérée. Explications.

Qui n’a jamais passé une journée à surfer sur le Web au bureau ? Ou résisté à l’irrépressible envie de remettre sa “to do list” à plus tard ? Procrastiner, en somme : c’est-à-dire, le fait de reporter. Souvent associée à la paresse, la procrastination a longtemps été jugée comme l’antithèse du travail productif. Une mauvaise habitude qui ferait perdre du temps à celui qui s’y abandonne. Pourtant, dans certaines sociétés, les regards évoluent progressivement… Des études tendent même à prouver qu’un travailleur “qui procrastine” serait plus productif qu’un salarié trop organisé et acharné à la tâche. La procrastination pourrait même devenir une méthode de travail pertinente pour réussir.

Pourquoi on procrastine ?

Les téléphones portables et autres objets connectés sont de constantes invitations à se détourner des tâches quotidiennes. Les sollicitations incessantes dont on fait l’objet encouragent le travailleur déconcentré dans la voie de la procrastination. Pour optimiser ces moments de procrastination, il est important d’en identifier les raisons : manque de motivation voire d’intérêt pour son job ou une mission, problème de méthode de travail et/ou d’organisation, management déconnecté ou inadapté… Les causes sont multiples et les conséquences immédiates, comme le stress d’accomplir une tâche au dernier moment ou la peur de mal faire. Et l’image de glandeur désorganisé peut coller à la peau auprès de collègues comme de proches. Quel que soit le profil du procrastineur, son attitude naît toujours d’un écart entre le plaisir (que l’on souhaite immédiat) suscité par une tâche et la motivation pour l’effectuer (la récompense différée). Si la gratification semble éloignée, il sera difficile de s’y mettre.

Temporiser pour mieux créer

Plusieurs études en sciences sociales ont démontré que l’esprit humain n’a pas la capacité de rester pleinement concentré plus de 52 minutes d’affilée sur une même tâche. Il a même été établi que pour une telle durée, 17 minutes de pause étaient nécessaires. À la lumière de ces faits, la procrastination prend une autre dimension. De moment de flemme contre-productif, elle deviendrait un temps nécessaire pour régénérer son cerveau et le reconduire vers une réflexion pertinente. Elle fonctionnerait même comme un auto-régulateur des émotions de chacun, une réponse à une situation stressante, à un manque d’estime de soi, à une peur de l’échec. Ce moment d’oisiveté offrirait la possibilité de temporiser pour mieux recommencer.

La procrastination stratégique

Loin d’être un handicap, la procrastination devient, si l’on parvient à la maîtriser, un booster de créativité. Qui n’a jamais connu l’angoisse de la page blanche, le vide face à un problème à résoudre ? Se déconnecter un moment, prendre du recul et laisser son esprit vagabonder pour décompresser avant de se concentrer à nouveau est souvent facteur de sortie de l’impasse intellectuelle dans laquelle on se trouve. Dans son livre La procrastination : l’art de reporter au lendemain (Autrement, 2012), le philosophe américain John Perry explique

“qu’une procrastination structurée est l’art de mettre à profit cette faiblesse de caractère”.

La hiérarchisation des tâches en fonction de leur difficulté, en laissant temporairement de côté les plus ambitieuses, aide à effectuer les autres plus sereinement. Établir une to do list donne le plaisir de biffer les tâches au fur et à mesure qu’on les accomplit et procure un sentiment de satisfaction bon pour le moral. 

Le procrastinateur structuré n’est peut-être pas l’homme le plus efficace du monde selon John Perry mais, en laissant libre cours à ses idées,

“il parvient à accomplir toutes sortes de choses à côté desquelles il serait passé s’il s’était astreint à un régime plus contraignant”.

D’autres personnes travaillent mieux dans l’urgence et savent transformer une anxiété en stress positif. On parle alors, selon le psychologue américain Neil Fiore, de “procrastineur chanceux”. La mauvaise image qui collait il y a quelques années aux procrastinateurs laisse ainsi la place à un champ des possibles moins restreint qu’il n’y paraît. Il s’agit seulement de procrastiner avec intelligence, pour que cela devienne efficace : savoir écouter son corps quand le cerveau dit “stop” et se remettre à la tâche au bon moment. Car quand la culpabilité de remettre à plus tard devient trop forte, c’est signe que la pause doit cesser...

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ALEXIA FRAY

Responsable de projet - Pôle Transformation Organisation Projet d'entreprise

2 ans

Moi, je n'arrive pas du tout à procrastiner..... sur les choses qui me font plaisir ! C'est grave docteur ? 🙄😁

jean yves antigny

Business et data analyst - CRM, BI et Marketing digital - Vulgarisateur du digital

2 ans

L'histoire de ma vie

Procrastiner, c’est un art ! Ne pas abuser bien sûr. Mais que c’est bon ;)

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