En 87 ans, Volkswagen est arrivé à faire de ses usines en Allemagne un havre de paix, ou tout du moins un espace où les salariés ont pu travailler sans risque de perte d’emploi, et avec des syndicats puissants, pour peser dans les décisions. Actuellement, un accord de protection des emplois est en vigueur, et doit faire effet jusqu’en 2029. Mais c’était sans compter sur les difficultés du groupe face au virage électrique, et à sa difficile équation pour arriver à dégager 10 milliards d’euros d’économie, dont 20 % de « frais de personnel administratif ».
Dans une lettre adressée aux employés et consultée par le Financial Times, la présidente du conseil des représentants des employés de Volkswagen Daniela Cavallo a affirmé que le directeur général de la marque, Thomas Schäfer, avait « admis » que les plans de réduction des coûts n’avaient pas répondu aux attentes. C’est dans les lignes suivantes que la question des usines est entrée en compte. Des propos historiques, qui risquent de faire froid dans le dos à bon nombre du personnel allemand de la marque, et aller au-delà de la stratégie de réduction que la marque a toujours suivie, par le biais de la courbe démographique.
« En conséquence, le conseil d’administration remet désormais en question les usines allemandes, les conventions collectives salariales internes de Volkswagen et le programme de sécurité de l’emploi en vigueur jusqu’à fin 2029 », a déclaré Daniela Cavallo.
L’industrie automobile dans une situation « très exigeante et grave »
L’accord de protection de l’emploi mentionné par la présidente du conseil est un accord en vigueur depuis 1994. Il interdisait les licenciements jusqu’en 2029, et pose aujourd’hui problème si Volkswagen compte fermer une usine, ou plusieurs usines, en Allemagne. C’est pourtant bien la situation qui semble se présenter à la marque, alors que lundi, le PDG du groupe Oliver Blume déclarait que « l’industrie automobile européenne se trouve dans une situation très exigeante et grave ».
Quant à Thomas Schäfer, lui disait que les plans de réduction des coûts « donnaient des résultats », mais que « les vents contraires se sont considérablement renforcés ». Au mois de juillet dernier, on se souvient bien du dépassement de BMW dans les ventes de voitures électriques européennes, devant Volkswagen et Tesla. Pour un constructeur qui n’est pas une marque généraliste comme Volkswagen, la pilule peut prendre du temps à passer.
En termes de chiffres, le bénéfice d’exploitation de la marque a chuté de 1,64 milliard d’euros à seulement 966 millions d’euros en une seule année. Pour se tirer vers le haut, Volkswagen pouvait compter sur des marques comme Audi et Porsche, mais là encore, les difficultés économiques ont eu raison des ventes et les deux constructeurs sont à la peine, notamment sur la question de l’électrique.
Du côté de Cupra, qui avait de quoi rendre jalouses les autres marques du groupe pour sa croissance et sa fraîcheur, l’horizon s’assombrit aussi. En cause, les frais de douane européens, qui vont toucher la production de son Tavascan, l’un de ses deux modèles électriques actuellement disponibles sur le marché. Avec le retrait de ses ventes, Cupra n’arriverait pas à atteindre ses objectifs de réduction carbone, ce qui pourrait mener à de fortes pénalités de la part de l’Europe.
« Détruire le coeur de Volkswagen »
Conséquemment à l’idée de fermer des usines, Daniela Cavallo s’en est prise à la direction. « [Elle] a échoué […]. La conséquence est une attaque contre nos employés, nos sites et nos accords de travail. Avec nous, il n’y aura pas de fermetures d’usines », déclarait-elle. Pour le négociateur du syndicat IG Metall, en charge de Volkswagen, l’approche de la direction « est dangereuse, car elle risque de détruire le coeur de Volkswagen ». En parallèle, c’est à Györ en Hongrie, dans l’est de l’Europe, que l’activité augmente alors que les usines d’Audi Hongrie, lancée au début de la décennie dernière, ont pris commande de la production du nouveau SUV Terramar, qui doit remplacer le Cupra Ateca.
Rappelons que sur les 680 000 salariés du groupe à travers le monde, Volkswagen en recense 300 000 en Allemagne. En attendant qu’une décision drastique ne s’opère, avec de potentielles fermetures d’usines, la marque a déjà accéléré le processus classique de suivi de la courbe démographique, en freinant le recrutement, et en proposant des indemnités de départ. La semaine dernière, le journal allemand Wolfsburger Allgemeine Zeitung rapportait que certains salariés avaient reçu des propositions d’indemnités accompagnées de prime spéciale, à 50 000 euros.
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