Le résultat de second tour de l’élection présidentielle était aussi attendu en Russie : en fonction du candidat élu, le Kremlin pouvait espérer un changement dans la politique de sanctions. La victoire d’Emmanuel Macron a été traitée pendant près de cinq minutes par la chaîne principale russe, Pervi Kanal, déclarant que Marine Le Pen avait perdu toutes ses chances après le débat du 20 avril.
Les journalistes n’ont fait aucune mention du prêt de 9,6 millions d’euros accordé par des banques russes au Rassemblement national, une de principales accusations de collusion faites par le président candidat lors de cette soirée.
Le reportage embraye sur l’image du président réélu. Il est légèrement tourné au ridicule, montrant notamment la fameuse de photo d’Emmanuel Macron, chemise ouverte sur le torse, et la diffusion d’un extrait de la parodie américaine de Jimmy Fallon.
L’idée d’une France et d’une Europe qui va subir une crise sans précédent
La seconde moitié du sujet est consacrée à la situation en France, en commençant par par des violences qui ont éclaté le soir de l’élection. Dans les faits, il y a bien eu quelques échauffourées, mais rapidement calmées. La TV russe, ainsi que de nombreux sites d’infos, mettent en avant des images de débordement à Paris et Lyon. Une habitude pour les médias pro-kremlin, qui partagent régulièrement des vidéos d’affrontement avec la police en France.
Une vidéo YouTube avec des bulletins de Marine Le Pen légèrement déchirés – et donc considéré comme nul – est diffusée suggérant que l’élection aurait pu être truquée en amont.
La principale chaîne reprendre le discours de Jean-Luc Mélenchon, notamment sa déclaration (erronée) sur Emmanuel Macron, considéré comme « le président le plus mal élu de la Veme République. »
Selon le journaliste, la France et l’Europe seraient au bord d’une crise sans précédent à cause des sanctions contre la Russie après son invasion de l’Ukraine. Une interview de Jean-Paul Thomas vient appuyer cette idée. Cet ancien chef d’entreprise en Russie et réputé proche du Kremlin, déclare que « l’U.E. et la France vont payer les sanctions russes, non seulement dans le secteur énergétique, mais aussi sur tous les produits ».
Izvestia, grand quotidien russe, angle également sur la crise et reprend les propos du sénateur Vladimir Dzhabarov. Ce dernier estime que le résultat aurait été différent si les élections avaient eu lieu à l’automne, « puisque les Français n’ont pas encore pleinement ressenti les conséquences des sanctions ». Le journal cite aussi le député européen Thierry Mariani qui a qualifié la réélection du président sortant comme « dangereuse pour la France », car il serait « un homme politique cruel envers les citoyens du pays ».
« Macron n’est ni Churchill, ni même Boris Johnson »
RIA Novosti, l’une des principales agences de presse russe, publie les déclaration de Konstantin Kosachev, vice-président du Conseil de la Fédération (équivalent du Sénat en France), sur sa chaîne Telegram. Dans l’article, le politique russe déclare que « la victoire d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle peut conduire à une augmentation du degré de radicalisme de Paris contre les russes, avec pour objectif, non pas la résolution de la situation en Ukraine, mais la démonstration du drapeau français ». Pour rappel, parler de guerre en Ukraine est interdit en Russie depuis le 4 mars et peut conduire jusqu’à 15 ans de prison.
Pour contourner la censure, les journalistes de Novaya Gazeta, principal titre d’opposition, ont lancé un site d’info en exil. Bien qu’ils saluent la victoire d’Emmanuel Macron face à une candidate d’extreme droite qui irait dans le sens du Kremlin, ils ne font pas non l’éloge du président réélu.
Ainsi pour Novaya Gazeta, « Macron n’est pas non plus Churchill ni même Boris Johnson, puisqu’il a déclaré il y a quelques jours que même après Bucha, il n’exclut pas la possibilité d’appeler Poutine, si cela aide à résoudre les problèmes humanitaires ». Le journaliste ajoute que « la politique pacificatrice de Macron consistant à exiger le dialogue avec la Russie n’a pu que convaincre Poutine qu’il ne rencontrera aucune opposition farouche de l’Europe ». Les mêmes critiques ont été émises par le gouvernement polonais.
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