Martin Eberhard est l’un des deux co-fondateurs historiques de Tesla, celui qui en a d’ailleurs choisi le nom. Il était à l’origine du projet de voitures électriques, avant qu’Elon Musk ne s’implique en intégrant le conseil d’administration, puis décide d’en prendre le pouvoir. Martin Eberhard a été évincé de Tesla Motors en 2007, alors que le premier Roadster électrique n’était pas encore sorti de l’atelier. Il a ensuite poursuivi sa carrière au sein d’autres marques, pour aider au lancement de leurs véhicules électriques.
La relation entre les deux hommes a été longtemps assez houleuse. À quelques jours de l’Investor Day de Tesla, c’est dans une interview d’Insider du 18 février 2023 que l’on retrouve de nouveaux propos de Martin Eberhard. Le co-fondateur historique de Tesla n’hésite pas à critiquer assez ouvertement les choix d’Elon Musk sur son obsession de la conduite autonome.
« C’est une erreur de considérer une voiture comme une plateforme logicielle »
Martin Eberhard n’est vraiment pas un grand fan de la conduite autonome. Certes, il trouve la technologie particulièrement utile, quand il s’agit d’intégrer des aides à la conduite plus performantes pour la sécurité des voitures et de leurs occupants. Toutefois, il désapprouve la manière dont Elon Musk a rendu le sujet central dès que l’on parle de Tesla.
Pour replacer dans le contexte, Martin Eberhard précise : « Gardez à l’esprit que toutes ces conneries de FSD autonome, de pilotage automatique — rien de tout cela n’existait quand j’étais là. » Avant d’ajouter : « Nous étions encore occupés à essayer de faire fonctionner la voiture et nous n’avons jamais pensé à cela du tout. C’est venu plus tard. Cela nécessite un budget, beaucoup, beaucoup plus important que celui que nous avions à l’époque. »
L’année dernière, Elon Musk déclarait que la différence entre une Tesla qui « vaut beaucoup d’argent et une Tesla qui ne vaut pratiquement rien » réside dans la conduite autonome. C’est ce qui incite Martin Eberhard à réagir ainsi. Avec Elon Musk, Tesla est devenu autant une entreprise logicielle que matérielle. Cependant, Martin Eberhard ne partage pas l’enthousiasme d’Elon Musk pour « ces conneries d’Autopilot ». Il reste persuadé que les voitures doivent être conduites : « J’aimerais que les gens pensent à fabriquer des voitures que les gens peuvent conduire. »
Avec toutes les technologies intégrées et les mises à jour à distance (OTA), on compare de plus en plus l’automobile à des smartphones sur roues. « Je pense que c’est une erreur de considérer une voiture comme une plateforme logicielle, vous savez, comme un iPhone ou autre. Ce n’est pas pareil », a déclaré Martin Eberhard à Insider.
Une voiture n’est pas un iPhone, un bug peut vous tuer
Martin Eberhard en profite pour pointer du doigt les limites de cette technologie : « J’ai un iPhone et chaque fois que je reçois une mise à jour logicielle, il y a des bugs. Ces bugs signifient, par exemple, qu’il arrive que mon application de flux d’informations se bloque. Ce n’est pas grave, car c’est juste un désagrément sur l’iPhone. Mais si ce genre de bug apparaît dans le logiciel d’une voiture qui contrôle, par exemple, mes freins ou la direction, cela peut vous tuer. »
Effectivement, lors des mises à jour du Full Self-Driving de Tesla, il y a toujours une part de bugs imprévus, qui incitent l’entreprise à faire des correctifs, envoyés très rapidement aux 400 000 véhicules concernés. Le système va être amélioré sur plusieurs éléments, ce qui risque de favoriser des comportements dangereux ou inappropriés, qui avaient parfois été déjà corrigés de longue date.
Certaines déclarations de Martin Eberhard vont certainement plaire au principal détracteur de la conduite autonome de Tesla, Daniel O’Dowd. Les deux hommes se rejoignent sur le sujet : « Je pense que la technologie est bien trop immature pour être posée sur la route », a déclaré Martin Eberhard. « Je veux dire, c’est ma nature prudente, mais j’aurais eu beaucoup de mal à diffuser sur les routes un logiciel aussi bogué que celui-là. »
Pour autant, si Martin Eberhard semble assez hostile aux méthodes d’Elon Musk, il reste assez fidèle à la marque qu’il a fondée. Il roule au quotidien avec un Tesla Roadster et sa femme avec une Tesla Model S.
Enfin, son conseil aux constructeurs traditionnels et aux jeunes entreprises innovantes est assez intéressant : « N’essayez pas d’entrer en concurrence directe avec Tesla. » Il ajoute : « Il y a différents types de voitures pour différents segments de marché. » Pour lui, c’est différent de l’univers de la Silicon Valley, où une entreprise leader peut tout raffler. Même si pour le moment Tesla domine assez largement le jeu, il juge que d’autres marques peuvent encore creuser leur trou, y compris sur la conduite autonome.
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