Les fake-news à l'heure des crises

“Toute allégation ou imputation d’un fait dépourvu d’éléments vérifiables de nature à la rendre invraisemblable”. Voilà comment sont définis les fake news selon la proposition de loi française anti fake news. 

La naissance des fake-news

Le terme a pris son essor lors des élections américaines de 2016, popularisé notamment par Donald Trump pour parler des informations désagréables à son encontre véhiculées par les médias. L’expression existait déjà et désignait le déferlement de faux articles, d’informations erronées diffusées en ligne et reprises sur les réseaux sociaux. L’expression a depuis été popularisée, utilisée en masse, parfois avec excès, malgré ses limites et définitions floues. À l’origine, leur apparition s’explique par la diversification des supports et de l’arrivée des médias sociaux pour Assane Diagne, rédacteur en chef du bureau d’Africa Check. La perte du monopole de partage de l’information pour les médias traditionnels et la naissance de ce “journalisme citoyen” ont accru le risque le partage de fausses informations. Passer d’une communication verticale à horizontale n’a malheureusement pas que des effets positifs.

Il faut distinguer l’information fausse divulguée sans intention de nuire, à celle dont le but est clairement de causer préjudice à la cible. On peut utiliser l’expression « information pollution » pour désigner cette dernière pour Florian Silckini, fondateur de l'agence LaFrenchCom. Un français moyen reçoit entre 800 et 1000 informations par jour aussi bien des médias traditionnels que des médias sociaux. Selon le cabinet Gartner, on recense aujourd’hui sur le net plus de fausses informations que de vrais. Une étude du magazine Sciences met quant à elle en avant que les fake news ont 70% de chances d’être plus retweetées que les faits avérés. Les fake news surfent sur la viralité des réseaux sociaux et leur pouvoir, et influencent vivement l’opinion publique. Elles jouent sur l’émotion, le côté sensationnel. Nombre des publications partagées sur les réseaux ne sont en réalité même pas lues en entier : seul le titre ou les premières lignes suffisent à convaincre de diffuser. 

Fake-news, infox et rumeurs en pleine crise : comment s'y retrouver ?

À l’heure de la crise sanitaire actuelle, nous réalisons que les fake-news prolifèrent plus que jamais autour de nous. La facilité de partage sur les réseaux sociaux et le manque de vérification des faits face à la vitesse de circulation de l’information font le succès des fakes news et infox en tout genre (les infox se définissant comme une information mensongère conçue de manière délibérée pour induire en erreur et être diffusée dans les médias de masse afin de toucher un large public). En effet, “si les médias demeurent évidemment un véhicule d’orientation majeure de l’opinion publique, l’individu est aujourd’hui un vecteur central de transmission de l’information. Il est devenu lui-même un média, non pas au sens strict de producteur d’informations, mais plutôt de support de diffusion massive de celle-ci” explique Geoffroy Daignes, consultant en communication. Il semble difficile de démêler le vrai du faux au travers de cette déferlante d’informations quotidiennes. Cela devient d’autant plus difficile quand les médias eux-mêmes - dont l’exercice déontologique est de vérifier la véracité des informations avant de les partager - participent à la diffusion des fake news. Cela a été le cas il y a quelques jours de Cyril Hanouna sur C8 qui a partagé une carte censée présenter un scénario de déconfinement, carte qui s’est rapidement confirmée être fausse par l’AFP. Cette fausse information n’est qu’une parmi beaucoup d’autres proliférée sur la toile depuis le début de la crise sanitaire. Parmi ces “rumeurs” les plus “célèbres” autour du Covid-19 on retrouve le fait que l'armée américaine aurait amené le Coronavirus à Wuhan, que le virus aurait été "créé en laboratoire" ou encore que les animaux pourraient transmettre directement le virus à l'homme. En bref, des fake news qui pullulent parmi l'information, la vraie, alimentant un climat anxiogène et l'anxiété collective. La propagation de ces fake news/infox/rumeurs autour du Covid-19 est telle que l'OMS lui a donné le nom "d'infodémie".

Avec cet avènement des réseaux sociaux et du partage “à tout va”, nous sommes tous devenus créateurs ou diffuseurs de fausses informations, alimentant un climat dangereux défiant la démocratie. En effet, ce phénomène est un “un symptôme servant de révélateur des oppositions qui traversent notre société”. Pour Geoffroy Daignes, “tenter de traiter ce problème appelle à se pencher sur la nature de nos désaccords profonds ainsi que sur notre manière de débattre collectivement. Pris autrement, il est un piège tendu aux amis de la démocratie qu’il convient de décrypter pour éviter qu’une nouvelle fois les tenants de l’hostilité sortent gagnants.”

Un "défi" pour contrer le phénomène de fake-news et d'infox

Afin de lutter contre ce phénomène, l'Union Francophone soutenue par le Ministère de la Culture et l’Assemblée parlementaire de la francophonie ont décidé de lancer "un défi" aux jeunes créatifs francophones qui portera sur la conception d'une campagne publicitaire de sensibilisation adaptée à une diffusion numérique, presse, affichage, radio, télévision et à destination du grand public. Il y a 5 grands objectifs à ce concours :

- Sensibiliser le public à la détection d’une « Infox » et à la nécessité de lutter contre le Coronavirus.

- Lui apporter les clés pour réaliser une lecture critique de ces informations et en faire un moyen efficace et accessible au plus grand nombre de lutte contre les « Infox ».

- Mobiliser les jeunes talents de la pub comme influenceurs.

- Sensibiliser les médias et réseaux sociaux pour relayer les campagnes .

- Valoriser nos médias et leurs efforts dans la lutte contre les « Infox », notamment par le biais des outils de prévention et d’information qu’ils mettent à disposition du grand public.

Le concours est ouvert jusqu'au 30 avril, plus d'informations ici.

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Sources :

• “Pour en finir avec les fakes news” - Geoffroy Daignes, 2019, cairn-info
• “Communication de crise : comment lutter contre les fake news ?” - Florian Silckini, 2020, lafrenchcom.fr 
• “Face aux fake news, (r)établir les faits” - Assane Diagne avec Sophie Eustache, Martin Lamotte et Stefan le Courant, 2019, cairn-info
• "Stop aux Infox COVID-19 : jeunes publicitaires francophones relevez le défi" - Influencia.net
• "Deep fakes : Plus que jamais, aiguiser son esprit critique est une nécessité absolue" - Influencia.net