La commission mixte paritaire réunissant sept députés et sept sénateurs a repris ses travaux vendredi à 8 h 30, en quête de compromis sur le budget de l’État, alors que plane toujours la menace de censure du gouvernement agitée par la gauche et le RN.
Le conclave, présidé par l’Insoumis Éric Coquerel, président de la commission des finances de l’Assemblée, est composé en majorité (huit députés et sénateurs sur 14) d’un camp gouvernemental à la manœuvre et a avancé sans encombre jeudi sur une version commune en adoptant la partie recettes du texte.
Les socialistes ont revendiqué des « victoires » sur le Fonds vert, l’agence bio, les transports du quotidien et surtout le rétablissement de 4 000 postes d’enseignants, confirmé par la commission. Mais venus avec une liasse d’amendements, ils sont largement repartis bredouille.
« Aucune de leurs propositions n’a été acceptée », a noté Éric Coquerel. L’élu communiste du Sénat Pascal Savoldelli, ulcéré par cette marge de manœuvre « extrêmement réduite », a même claqué la porte avant la fin.
Et vendredi, plusieurs points chauds comme le budget de l’aide médicale d’État (AME) dédiée aux soins des étrangers en situation irrégulière, pourraient dessiner de nouvelles « lignes rouges ».
« Cela fait partie des conditions absolument “sine qua non” », a martelé le président du groupe PS Boris Vallaud, appelant le bloc central à ne pas « céd (er) aux plus vils fantasmes de l’extrême droite ».
Selon des sources parlementaires, la CMP devrait acter la diminution des crédits alloués à l’AME, de 200 millions d’euros sur 1,3 milliard. Une décision récusée par le PS qui en fait une ligne rouge mais voulue par LR qui participe au gouvernement de François Bayrou.
Ce dernier peut, jusqu’à lundi encore, lorsque le texte de compromis, s’il est trouvé, sera soumis au vote de l’Assemblée, procéder à des arbitrages. Vendredi cependant, son ministre des finances Éric Lombard a encore promis sur TF1 que le gouvernement « respecter (ait) le texte qui sortira » de la CMP.
À propos de l’AME, il s’est contenté de souhaiter qu’« il y ait un compromis », rappelant que « c’est important en termes de santé publique ».
Les débats de jeudi, qui ont permis notamment l’adoption de la partie « recettes » du budget, destinée à contenir le déficit à 5,4 % du PIB en 2025 au prix d’un effort budgétaire de 50 milliards d’euros, ont entériné la limitation à un seul exercice (au lieu de deux) de la contribution exceptionnelle pour les grandes entreprises, objet des critiques du PDG de LVMH Bernard Arnault.
Autre mesure adoptée, la contribution différentielle demandée aux plus hauts revenus en 2025, censée rapporter environ deux milliards. La gauche espérait la voir étendue, voire pérennisée, mais sans succès.
« Nécessité d’avoir un budget »
Mais ils ont aussi été le théâtre d’une prise de parole du député du Rassemblement national Jean-Philippe Tanguy à propos de l’article 4 du projet de loi qui pose un nouveau cadre de régulation des revenus d’EDF issus du nucléaire et pourrait, selon le parti à la flamme, causer une hausse des prix.
« Si cet article passe, ça veut dire, dans la décennie qui vient, une augmentation du prix de l’électricité pour les entreprises, pour les ménages encore de 10 % », a insisté Jean-Philippe Tanguy vendredi sur RTL.
Maintenant que l’article a été adopté dans la version commune, il a menacé une nouvelle fois de proposer à son groupe de voter la censure du gouvernement. « Il y a des sujets extrêmement graves dans ce budget (mais) il y a aussi la nécessité d’avoir un budget », a-t-il expliqué.
Les socialistes également refusent à ce stade de dire si le groupe votera la motion de censure qui sera déposée dans le cas probable où François Bayrou utiliserait le 49.3 pour faire adopter les conclusions de la CMP sans vote.
« Nous dirons à nouveau (au gouvernement) ce qui nous paraît manquer dans ce budget et les efforts supplémentaires qu’il aura à accomplir », a simplement déclaré Boris Vallaud, ni triomphant ni résigné, alors que le PS semblait davantage enclin à voter la censure depuis les propos de François Bayrou sur la « submersion » migratoire.