L’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes, des cordes sensibles au cœur de la France
Invité mardi 14 janvier à Notre-Dame de Paris, l’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes compte parmi les meilleures formations de chambre européennes. Rencontre avec des artistes tout entiers au service du raffinement musical.
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En ce soir pluvieux de décembre, le public se presse dans le hall de l’Opéra-Théâtre de Clermont-Ferrand. L’année musicale de l’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes s’achève avec L’Enfance du Christ d’Hector Berlioz (1854) : succession de scènes sacrées dessinées, selon leur auteur, « à la manière de vieux missels enluminés », entre naïveté et émerveillement. Sur la scène de la jolie salle à l’italienne d’une capacité de 500 places, les instrumentistes auvergnats ont été rejoints par les voix du chœur lyonnais Spirito et un plateau de solistes. Ils incarnent avec ferveur Marie et Joseph, le roi Hérode ordonnant le massacre des innocents, sans oublier le récitant qui, à la manière des conteurs d’antan, évoque la crèche puis la fuite en Égypte de la Sainte Famille.
La dentelle instrumentale de la partition où les cordes susurrent et consolent est mise en lumière par l’orchestre créé en 1981 et légitimement labellisé « Orchestre national en région » depuis 2019. Une formation composée de 22 musiciens – violonistes, altistes, violoncellistes et contrebassistes – renforcés d’artistes supplémentaires quand le répertoire l’exige. Vincent Lucas est de ceux-ci pour L’Enfance du Christ. Flûte solo à l’Orchestre de Paris, il retrouve fréquemment ses amis et collègues clermontois, « une dizaine de fois par an, toujours avec le même bonheur », confie-t-il quelques minutes avant le concert. Originaire d’Auvergne – « mes parents sont là ce soir ! » – le virtuose conseillerait d’ailleurs « à tous les membres de grandes formations symphoniques de jouer régulièrement au sein d’une telle équipe. Le petit effectif favorise l’écoute réciproque, chaque détail est travaillé dans un esprit collégial, respectueux et constructif ».
Deux concerts à Notre-Dame de Paris
La pause des fêtes passée, l’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes entamera une année 2025 des plus riches. Sur son agenda, trois passages par Paris, dont deux à Notre-Dame de Paris, à l’invitation de sa Maîtrise et de son chef Henri Chalet : le 14 janvier pour le Requiem de Fauré puis les 13 et 14 mai pour celui de Mozart. « Nous en sommes heureux et émus, souligne Lila Forcade, directrice générale de l’orchestre. Nos relations avec la Maîtrise se sont renforcées lorsque nous l’avons conviée à se joindre à nous alors qu’elle était sans domicile, durant la reconstruction de la cathédrale. » Pour une phalange régionale, aussi excellente soit-elle, se produire à Paris reste difficile. « C’est donc une très grande chance, d’autant que nous sommes également au programme de Théâtre des Champs-Élysées dans la Passion selon saint Matthieu de Bach le 9 avril, sous la direction d’Enrico Onofri, l’un de nos chefs associés, fin connaisseur du répertoire baroque. »
Installé depuis dix ans dans les murs de l’Opéra-Théâtre de Clermont, l’orchestre bénéficie d’une salle de répétition avec vue imprenable sur la ville et la chaîne des Puys, de locaux administratifs, de loges et de foyers accueillants. C’est là que les artistes se retrouvent en tutti ou par petits groupes pour « maintenir et améliorer encore le niveau », explique Ryo Kojima. En France depuis neuf ans, le violoniste japonais s’est installé à Paris avant de se présenter en 2023 au poste de co-solo des premiers violons. « J’avais 30 ans et ma rencontre avec Guillaume Chilemme, super-soliste de l’Orchestre d’Auvergne, a été déterminante. Sa musicalité, son intelligence sont si exemplaires que l’envie de travailler avec lui et ses amis s’est imposée. »
Quitter la capitale pour s’ancrer en Auvergne fut un « saut dans l’inconnu » que v ne regrette pas. « J’adore jouer du violon, mais tout autant échanger avec les autres instrumentistes et assurer le lien avec le chef d’orchestre. L’expérience collective m’est nécessaire, peut-être parce que je suis fils unique… Mon père et mon premier professeur jouaient tous les deux dans un orchestre de chambre à Hiroshima, ma ville natale, et leur exemple a sûrement compté. » Quant aux concerts à Notre-Dame, Ryo Kojima les attend avec impatience. « Je logeais à la Cité des arts en 2019 et j’ai vu l’incendie depuis la fenêtre de ma chambre. Y revenir aujourd’hui, c’est un privilège et, surtout, un rêve ! »
Orchestre en mission
Tout fraîchement arrivée, la violoniste Anne-Catherine Promeyrat, membre de l’orchestre depuis octobre dernier, voit, elle aussi, un idéal se concrétiser. « J’ai passé plusieurs fois le concours d’entrée avant d’être engagée », témoigne avec modestie cette « Auvergnate mariée à un Auvergnat », ravie d’intégrer une formation où se côtoient diverses générations de musiciens. « C’est fascinant de travailler auprès de ceux qui transmettent la mémoire de l’orchestre. Je suis très impressionnée par la fusion d’individualités singulières en une sonorité parfaitement unie. » Elle se réjouit de la forte présence de la phalange dans la région, « dans les salles de concert bien entendu, mais aussi les hôpitaux, écoles, maisons de quartier… Cette mission pédagogique et sociale, je la remplis avec conviction mais plus encore avec joie ».
Ce n’est pas Lila Forcade qui la démentira, elle qui insiste à la fois sur le Festival des cathédrales, lancé l’été dernier et dont l’édition 2025 parcourra en musique plusieurs édifices remarquables de la région, et sur une nouvelle initiative, développée grâce aux mécènes de l’orchestre. « Intitulée “L’âme heureuse”, elle propose des cours de violon, à raison d’un par semaine, à des patients hospitalisés en long séjour dont les journées sont très monotones. » Financée par la région, le département du Puy-de-Dôme et la ville, la formation ne souffre pas de baisse de ses subventions, « même si nous demeurons vigilants et que la construction d’un auditorium digne de ce nom n’est pas d’actualité, hélas ».
Il permettrait de magnifier la qualité d’un orchestre reconnu bien au-delà des frontières, comme le prouvent ses tournées au Japon, en Corée, aux États-Unis… « À chaque fois, l’accueil du public récompense nos efforts, sourit Jean-Marie Trotereau, premier violoncelle solo depuis 1985. Nous cultivons un joyau au quotidien. Comme on n’atteint jamais ce que l’on désire, il faut beaucoup d’humilité. Et une dose tout aussi importante d’enthousiasme. »
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L’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes en tournée
L’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes a pour directeur musical le violoniste et chef Thomas Zehetmair, le violoniste Enrico Onofri et le pianiste Christian Zacharias étant chefs associés.
Parmi les temps forts de 2025, une tournée aux États-Unis du 13 avril au 4 mai sur les pas de La Fayette, né en Haute-Loire en 1757 et héros de l’Indépendance américaine. Concerts à New York, Washington, Nashville, La Nouvelle-Orléans…
Pour tout savoir sur l’orchestre, ses prochaines dates et bénéficier de concerts disponibles en streaming : onauvergne.com
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