Le Clézio et Michaux
J.M.G. Le Clézio, Vers les icebergs, Fata Morgana, 1978. Récolte de 2 récits de le Clézio et de 1 poème d’Henri Michaux, sans illustrations, 22.5 x 14.5 cm
Couronné en 2008 par le prix Nobel de la littérature, Le Clézio a édité son premier roman Le proces-verbal en 1963 (Gallimard). De nombreux contes pour enfants, souvent illustrés par Georges Lemoine, ont été édités par la suite (Gallimard Jeunesse), jusqu’à nos jours.
Grand voyageur, sensible au monde de l’enfance, Le Clézio raconte avec douceur les aventures de jeunes personnes plongées dans des rythmes somnolents et silencieux, en contact avec la Nature nourricière, mais sévère et exigeante. Paysages plongés dans une lumière flottante, montagnes comme gardiens de glaciers, oiseaux seuls êtres vivants : le spectacle de la nature s’offre aux yeux d’enfants, ses bruits deviennent musique, vite suffoquée par des grands silences, ou chuchotée par le mouvement lisse des glaciers.
Cieux immenses, terres sans hommes, océans solitaires, la narration de Le Clézio devient ascension sans vertige vers les dieux ou vers une nouvelle naissance dans un autre monde.
Les enfants deviennent de jeunes dieux au regard infini, des rois des morts ressuscités qui parlent leur propre langue pour vénérer la connaissance, inspirée par des terres lointaines.
Véritable hommage à Henri Michaux, Le Clézio se réfère à « deux poèmes extrêmes » de Michaux, Iniji et Icebergs : « Ce qui étonne, dans la poésie d’Henri Michaux, c’est cette force, jointe à ce silence. Il n’y a sans doute aucun autre poète de ce monde occidental (car l’on trouve naturellement beaucoup plus d’affinités avec l’Orient, et cette science de l’économie des Haïkai-Hokku) qui sache dire tant de choses en si peu de mots.» (p.7).
Et Le Clézio continue : « Je veux lire la poésie d’Henri Michaux comme on voyage […]. La parole de Michaux nous éloigne de notre monde, nous guide à l’aventure, nous donne un autre monde. Lire est voyager, car nous oublions ce que nous sommes, nous entendons un nouveau langage. »
Le poème de Michaux, reproduit dans l’édition Fata Morgana, chante la beauté du pays du Nord et l’infini de l’Univers : « Fluides, fluides /tout ce qui passe/passe sans s’arrêter/passe » (p. 36).